Arrière -cour de nouvelles tensions géopolitiques des grandes puissances .

Le  Groenland , immense ,mais très peu peuplée région autonome danoise, au cœur de la « région monde » ultra- stratégique de l’Arctique , suscite des appétits  croissants et une vive compétition entre les  grandes puissances  mondiales. L’enjeu de ses tensions, ce sont les réserves de « terres  rares  » …jusqu‘à  justifier« l’annonce choc » en 2020  de Donald Trump sur l‘éventualité de son  acquisition par les USA.

 Comme le rappelle Damien Degeorges dans son  remarquable  essai*, les Terres Rares, légères ou lourdes, constituent un groupe de métaux comprenant 17 éléments dont 15 lanthanides allant du lanthane  à l’yttrium. Elles restent «  modérément abondantes »,quasi monopolisées par la  Chine, et incontournables dans de nombreuses productions sensibles (numérique, puces  informatiques ,etc,)  .Comme elles sont associées à des éléments radioactifs comme l’uranium et le thorium leur exploitation reste très sensible . Aussi, pour leur extraction et leur affinage ,ces terres rares  posent un dilemme environnemental majeur,  il a été établi en  effet que le Groenland restait l’un des pays disposant des plus importantes réserves au monde de ces « trésors » contemporains.

 Par ailleurs, l’enjeu géopolitique que sous tend le potentiel en terres rares du Groenland aura fortement impacté ses propres choix politiques, jusqu’à lui  faire rêver de devenir ,comme son  voisin Islandais ,un Etat autonome .           Mais cette utopie se heurte à une réalité première, son incapacité à pouvoir  disposer durablement des  attributs d’une pleine souveraineté ( monnaie ,  défense , budget ,etc). Avec un territoire quatre fois plus grand que celui de la  France, quasi intégralement recouvert d’une calotte glaciaire et  guère plus que 50000 habitants concentrés majoritairement dans leur capitale  Nuuk , le potentiel de développement autonome reste très mince même si des ressources pétrolières (difficiles à  exploiter) peuvent venir s’ajouter aux  réserves des terres rares  .Reste que ce pays  de « l’or  vert » n’est pas à  vendre  bien qu’il soit menacé par les ambitions chinoises qui souhaitent renforcer encore plus leur leadership sur les terres et  ressources rares ,  et par  les enjeux  majeurs des intérêts vitaux de Défense pour les  Etats Unis  . Toute la stratégie  géopolitique autour de  ce «  petit département danois » , prétendument autonome, tient à ce que les  terres rares sont incontournables à la fois à l’ère numérique mais également et surtout comme le  note  Damien Degeorges** : « …dans un siècle où l’ économie faiblement émettrice en gaz à effet de serre s’affirme comme préalable à toute  croissance… » ;  ce qui appelle,de facto, une concurrence dans leurs recherches – approvisionnements, de plus  en plus forte.

  Aussi l’extrême vigilance s’impose- t- elle pour les pays arctiques, face au défi  des appétits chinois mais tout autant , dans une région qui reste l’ arrière- cour des Etats Unis et… de la  Russie.   C’est dire combien  cette  « région monde »  représente des  risques  d’ extrêmes  tensions géopolitiques pour l’avenir . Comme l’avait noté  Deng  Xiaoping :   «  Le Moyen Orient a le pétrole, la Chine a les  terres rares. »

 L’ultra dépendance  notamment sur les  terres  rares à la Chine n‘est pas saine du fait de la nature du régime chinois et de ce qui en découle .  « ..entamer une cure de désintoxication.. » à cette  dépendance, au plus tôt, est  d’ une nécessité absolue  .Enfin et surtout ,la bataille en cours, souvent  sous-marine , de plus en plus diplomatique , entre les  grandes puissances ,( mais pas  seulement , La  France tente  via une présence diplomatique de « grande notoriété » aussi de  tirer quelques marrons  du  feu..)   s’accélère pour faire bouger les lignes autour et sur le Groenland.

Quoiqu‘ il en soit, les conditions nécessaires au retour des pays arctiques et de leur ancrage à l’Europe sont loin d’être réunies :  Raison de plus  pour  éveiller notre  attention sur le défi  sécuritaire posé par l’ intérêt de la Chine pour le Groenland d’ autant que « …cette croissance consommatrice de  terres  rares ne  sera « durable » in fine que lorsque des développements significatifs auront lieu en matière de  substitution et de  recyclage des terres  rares.. »

                                                             Jean –louis CHAMBON

                                                     Président – Fondateur du  Cercle  Prix Turgot

**   Damien  Degeorges :Terres  rares : un enjeu géopolitique du XXIe siècle :  :L’Harmatttan  2020